Nature

Le mot du billet d’aujourd’hui m’est venu à l’esprit ce matin et cherchait à capter mon attention. C’est comme s’il me disait; vient m’explorer ! J’ai donc décidé de l’écouter et d’en faire mon point d’intérêt pour voir ce qu’il avait à me raconter.

Cela fait quelque fois que j’écris que l’être humain n’est pas séparé de la nature mais qu’il en fait partie. Cette nature que nous regardons n’est pas quelque chose d’extérieur à nous. C’est quelque chose que nous voyons de l’intérieur car nous sommes dans la nature et la nature est en nous.

Parmi nos ancêtres lointains, on retrouve le poisson; notre origine se situe donc dans un milieu marin. En 2004, des scientifiques ont découvert les fossiles du Tiktaalik dans l’arctique canadien. Ce poisson vieux de 375 millions d’années est doté de quatre pattes et dispose de poumons et d’os similaires à ceux qui forment nos mains et nos pieds. Ce poisson représente une évolution importante car les scientifiques croient que c’est l’une des premières formes de vie à avoir amorcé la transition entre le milieu marin et la terre.

À partir de ce poisson, l’évolution s’est poursuivie durant 375 millions d’années pour arriver à l’être humain tel que nous le connaissons aujourd’hui. Bien qu’on puisse penser que nous n’avons plus rien en commun avec cet ancêtre et le milieu marin qu’il habitait, la réalité est toute autre. Nous avons quitté la mer, mais la mer ne nous a pas quittés. Notre corps est toujours formé de plus de 65% d’eau et la mer coule dans nos veines. L’examen de la composition de notre sang révèle qu’il a une composition étonnamment identique à celle de l’eau de mer en termes de sels minéraux. La proportion de sodium, de potassium et de chlore dans nos tissus est étrangement similaire à celle de l’eau des océans. Nos larmes et notre sueur sont en réalité de l’eau de mer. Lorsque des émotions nous inondent, c’est une vague qui nous traverse. Notre cycle de reproduction se fait toujours dans un milieu aquatique; spermatozoïde et ovule se rencontrent grâce à la présence d’un fluide qui les transporte; le fœtus grandit dans une bulle liquide jusqu’à sa naissance.

L’origine de la vie sur Terre remonte à plus de 3,5 milliards d’années. L’histoire des ancêtres qui forment notre lignée est donc une longue histoire. Une histoire qui s’est écrite patiemment, une lettre, un mot, une phrase, une page et un chapitre à la fois. Cette histoire on la retrouve imprimée dans notre code génétique. Un de nos ancêtres récents, le chimpanzé, a un code génétique qui ne diffère que de 1.2% avec nous. On voit donc que ce que nous sommes aujourd’hui conserve une forte empreinte de nos origines. Nous sommes tous encore à la fois poisson, animal et être humain. Nos origines ne peuvent être ni reniées ni cachées. Aller à la recherche de nos ancêtres et de nos origines, c’est redécouvrir ce que nous sommes.

Puisque nous sommes la nature et que la nature est en nous, quelle est l’essence de notre nature ?

Le mot nature vient du latin natura qui signifie cours des choses, qualité et qui a comme origine le mot nascor qui signifie naître. Le sens original du mot nature est donc littéralement celui d’une naissance. La naissance est une manifestation. C’est le propre de quelque chose qui apparaît de lui-même, qui éclot et qui exprime ce qui se cachait dans son germe. C’est une croissance autour d’un centre qui est intérieur. C’est un déroulement.

La nature est essentiellement poétique. Si on examine la racine du mot poésie, on découvre qu’il vient du grec poiêsis qui signifie création. L’essence de la nature est la créativité. Cette créativité lui permet d’être, de se transformer, de se réinventer et de renaître constamment. En sciences, on qualifie cette propriété particulière de la nature de s’auto-créer comme étant de l’autopoïèse. C’est la propriété d’un système qui s’invente par lui-même et qui se métamorphose pour s’adapter à son environnement et aux conditions qu’on y retrouve. L’essence même de notre propre nature, est donc de naître par nous-mêmes et de nous transformer continuellement. Cette transformation est le fruit des relations que nous entretenons avec tout ce qui nous entoure. Nous transformons tout ce que nous touchons et tout ce que nous touchons nous transforme.

La diversité dans la nature est la manifestation de la richesse d’un être unique dont nous sommes tous une partie. Nous ne sommes qu’un avec ce qui nous entoure.

À l’échelle planétaire, la nature a tout d’un organisme. Les océans qui la composent, l’atmosphère, les différents biomes, la géologie terrestre, les microbes, bactéries et toutes les formes de vie composent un ensemble interdépendant, un système dynamique qui entretient des relations et qui n’existe qu’à travers et que grâce à ces relations.

La vie pour la nature est une façon de faire l’expérience d’elle-même, une façon de se découvrir en se manifestant et en se ressentant. À travers sa créativité, la nature explore l’espace des possibles pour apprendre à mieux se connaître. Nous sommes ses agents de connaissance. Le mouvement de va et vient de notre respiration correspond au mouvement de va et vient de cet univers qui crée de nouvelles formes de vie qui l’inspirent et l’aident à connaître. Qui l’inspirent à découvrir ce qu’il est vraiment, ce pour quoi il existe. De nouvelles formes de vie qui en devenant de plus en plus complexes, de plus en plus conscientes peuvent diriger leur attention vers lui et l’aider à découvrir le sens de son existence.

Nous évoluons à l’échelle individuelle en passant de l’enfance à l’adolescence puis de l’adolescence à l’âge adulte. Nous recevons ensuite cet appel de nos origines pour nous faire découvrir l’histoire de notre vie. L’être dans lequel nous nous inscrivons a le même besoin; il est lui aussi à la recherche de sa finalité. Pour pouvoir découvrir sa finalité, il a besoin de nos yeux pour que nous posions notre regard sur lui et de nos mains pour toucher et ressentir. Car c’est à travers ses sens qu’il vit des expériences et se transforme. C’est par le fruit de l’expérience de ses sens qu’il peut ressentir et que sa vie prend tout son sens.

L’univers qui nous entoure ne fait qu’un avec nous. Nous ne sommes pas séparés de l’univers; nous sommes l’univers. Cet univers est un fœtus, c’est un être en construction; pour pouvoir naître, il nous met d’abord au monde. À travers les expériences de la vie, il nous forme et nous transforme pour que nous devenions un homme-sage et une sage-femme, car il a besoin de nous pour le mettre au monde, pour qu’il émerge.

C’est notre responsabilité de faire naître cet être en devenir, de faire accoucher ce soleil humain. Bâtir notre village, c’est une façon d’écrire son histoire. Bâtir notre village, c’est nous préparer à co-naître; faire naître d’abord puis renaître.

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